дурак ! (mardi, 01 mars 2022)
Poutine est un magicien : il a ressuscité l'OTAN, renforcé l'Union Européenne, va y faire adhérer l'Ukraine, poussé la Suisse à s'y et va sans doute faire réélire Macron
Poutine était certain de ne pas déclencher de riposte militaire "occidentale" s'il envahissait l'Ukraine : les USA, l'OTAN, l'UE avaient assuré qu'ils n'entreraient pas en guerre. Mais il avait sans doute sous-estimé le risque de réactions militaires indirectes (les livraisons d'armes) et non-militaires (les sanctions) qui aillent au-delà de postures. Il pouvait croire qu'Européens et Américains étaient prêts à sacrifier l'Ukraine comme les Européens avaient il y a trois quarts de siècle sacrifié la Tchécoslovaquie "pour sauver la paix". Il n'avait sans doute pas compris que sans entrer en guerre, ils allaient tout faire pour qu'elle lui soit, et soit à la Russie, la plus coûteuse possible (en hommes, en matériel, en ressources financières), tout en étant un coût acceptable pour l'Europe et les USA. Poutine est un magicien : il a ressuscité l'OTAN, renforcé l'Union Européenne, va y faire adhérer l'Ukraine, poussé la Suisse à s'aligner sur les sanctions européennes et à s'interroger sur le sens du mantra neutraliste, et va même sans doute faire réélire Macron sans qu'il ait besoin de faire campagne. Poutine, c'est le Mickey de l'"apprenti sorcier" du Fantasia de Disney... Chapeau, l'artiste !
La guerre s'arrêtera quand le sol russe, celui de la société russe, de dérobera sous Poutine
D'entre les plus admirables performance du magicien du Kremlin, il y a celle-ci, qui n'a peut-être pas bouleversé l'ordre mondial (quoique...) mais qui a été relevée dans les media du monde entier (ou presque) : la Suisse s'est totalement ralliée aux sanctions prononcées par l'Union Européenne contre Poutine et la Russie. ça n'était pourtant pas gagné : certes, dans un premier temps, la Suisse, par le biais du DFAE avait condamné "dans les termes les plus forts l'invasion russe de l'Ukraine", appelé Moscou à cesser "immédiatement l'agression militaire" et à retirer ses troupes du territoire ukrainien., mais elle traînait les pieds quand il s'agissait de prendre des sanctions. On devait attendre plus de notre "démocratie-témoin", elle vient de le faire en s'associant totalement aux sanctions européennes. "La neutralité n'est pas synonyme d'indifférence", a fini par déclarer le président de la Confédération. Parce qu'enfin, c'est quoi, et elle vient d'où, la neutralité suisse ? C'est, essentiellement, depuis 1815, se tenir hors de toute alliance militaire. Mais pas forcément de toute alliance politique : pendant toute la guerre froide, la Suisse se tenait, de toute évidence, dans le "camp occidental" -mais cela ne l'a pas empêché d'être l'un des premiers Etats occidentaux à reconnaître la Chine populaire.
Il fallait prononcer des sanctions -mais les seules sanctions qui se justifient sont celles qui frappent le pouvoir russe, les potentats russes, les oligarques russes -et d'entre l'appareil de sanctions européennes à laquelle la Suisse a adhéré, certaines sont précisément de ce type. Mais d'autres ont des cibles beaucoup plus larges, et plus indistinctes. Et puis, s'il ne faut pas sous-estimer l'ampleur des sanctions prononcées contre la Russie, et leur impact symbolique et psychologique, du blocage des avoirs russes à la suspension de toute relation aérienne avec la Russie, il n'en faut sans doute pas attendre qu'elles fassent plier le pouvoir russe. Elles étaient nécessaires, elles ne sont pas suffisantes : l'Iran est sous sanctions depuis des années, le régime islamiste n'est pas tombé
Les promoteurs des sanctions affirment vouloir isoler Poutine et la Russie, mais ce sont tous les Russes qui seront isolés, ceux qui s'opposent à la guerre comme les oligarques dont les comptes en Suisse sont bloqués. Or si la clef de la fin du conflit, c'est certainement en Russie qu'il faut la chercher, ce n'est pas au Kremlin. Ce sont bien les Russes, pas les "Occidentaux", qui peuvent arrêter la guerre : les Russes qui dès le déclenchement de la guerre se sont mobilisés contre elle, ont manifesté contre elle, l'ont dénoncée. Et si nous pouvons, ici, faire quelque chose, dire quelque chose, proposer à nos parlements communaux, cantonaux, nationaux, de dire et de faire quelque chose, au-delà de l'adhésion aux sanctions européennes, c'est de soutenir les mouvements sociaux qui, en Russie s'opposent aux guerres de Poutine, de soutenir les derniers media libres de Russie, de soutenir les intellectuels, les artistes, les sportifs, les simples citoyens et citoyennes qui depuis des jours affirment, à leurs risques et périls, en manifestant leur opposition à Poutine et pour certains, en démissionnant de leurs fonctions officielles pour ne plus rien avoir à faire avec le pouvoir qui les a nommés.
La guerre s'arrêtera quand le sol russe, celui de la société russe, se dérobera sous Poutine.
17:10 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : ukraine, poutine, neutralité, sanctions | |
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Commentaires
Ce sont les Américains qui sont des magiciens: en transformant les Européens en porte-voix de leurs obsession anti-socialiste et anti-communiste (le communisme soviétique est mort partout sauf dans la tête des dirigeants US) ils ont réussi tout ce que vous attribuez à Poutine.
Il était une époque où nos socialistes faisaient porter tous les maux du monde aux USA, nous somme maintenant dans un monde inversé: après avoir maltraité et humilié les Russes pendant plus d'une décennie et ne fait aucun effort pour bâtir une Europe sûre pour tous, on va demander à Poutine de se soumettre à toutes les demandes de l'Otan et de l'UE sans même prendre le risque et embrasser l'espoir d'une conférence européenne sur la sécurité telle qu'un Luc Ferry l'a évoqué.
Écrit par : Mère-Grand | mardi, 01 mars 2022
Il a certainement provoqué une conscience européenne au-delà de l'économie. L'UE avait déjà quitté sa position bisounours en décidant qu'elle ne doit plus être dépendante sur des produits stratégiques.
Maintenant, s'est ajouté la conscience que l'Europe doit s'émanciper des US politiquement et militairement. Trump a été un déclencheur, et Biden, consciemment ou pas, par sa passivité , pousse l'Europe à prendre ses responsabilités. La retraite de Merkel a débloqué ce processus.
Vous avez oublié de dire que des gauches et droites radicales européennes sont ko. Ceux qui ont vite réagit, ont sauvé la face comme die Linke, Le Pen dans une certaine mesure, sinon ça tombe dans le ridicule puisqu'ils répètent la propagande ("c'est la faute à l'OTAN") pour se dédouaner.
On en vient à la honte UDC. En dehors de quelques individualités qui parlent sans ambiguïté, son aile droite ne s'est pas émancipé de Poutine, le mantra est: c'est la faute aux européens et ricains.
J'attends une position plus claire de l'aile droite face à cette invasion qui rappelle l'histoire des suisses qui ont obtenu l'indépendance en se battant contre un empire. Cette UDC semble soutenir les habsburgs, ils se renient eux-mêmes.
Écrit par : motus | mardi, 01 mars 2022